Un outil pour le dépistage de l’autisme en Belgique
Raccourcir l’errance diagnostique de l’autisme, outiller les professionnels autour de l’enfant, dépister les enfants à risque dès la maternelle : voilà tout le potentiel de ce nouvel outil de dépistage de l’autisme. Le dépistage de l’autisme est actuellement un défi majeur dans la plupart des pays francophones. L’Autism Discriminative Tool (ADT) permet d’identifier facilement, rapidement et de façon précise si l’enfant au développement atypique présente une suspicion d’autisme ou s’il s’agit d’une autre pathologie développementale, d’un retard du langage ou de troubles psychologiques. Un article scientifique sur cet outil de dépistage a été récemment publié dans le journal Research in Autism Spectrum Disorders, soulignant son adéquation pour contribuer à répondre au défi du dépistage de l’autisme et l’envoi plus rapide des patients suspectés vers des services diagnostiques tertiaires adaptés.
L’étude de validation[1] de l’outil a été réalisée en multicentrique, rassemblant 118 enfants sans difficultés développementales et 126 enfants reçus en Centres Ressources Autisme pour un bilan diagnostique. Il en est ressorti que les professeurs sont très pertinents dans l’observation des signes d’autisme, devançant légèrement les parents. Non seulement les professeurs observent, à juste titre, plus de signes autistiques que les parents mais ils rapportent surtout les difficultés de socialisation en groupe. A contrario, les mères vont être plus performantes dans l’analyse de la relation inter-personnelle là où les pères sont souvent plus objectifs dans leur analyse de la situation. « Le potentiel de combinaison de l’évaluation d’un clinicien, de la cellule familiale et de la cellule scolaire permet de détecter avec davantage de certitude les enfants qui présentent effectivement de l’autisme, sur base des critères différents », explique Sophie Carlier, docteure en psychologie à l’Hôpital Universitaire des Enfants Reine Fabiola et conceptrice de l’outil. Stéréotypies et critères socio-communicatifs
Créé pour pallier aux défauts des questionnaires existants (ex : trop de faux-positifs), l’ADT est composé de 35 items basés sur l’absence ou la présence de comportements précis, dont 26 sont utilisés dans une optique de dépistage des troubles du spectre autistique. « Cet outil est le seul test en français à être basé sur les nouveaux critères diagnostiques de l’autisme tels que définis dans le DSM-5. En plus des questions relatives aux difficultés socio-communicatives, l’ADT intègre quinze questions relatives aux comportements stéréotypés. Parmi ces items, l’ADT met systématiquement en évidence les particularités sensorielles, marqueurs prédominants chez l’enfant présentant de l’autisme: par exemple, l’enfant regarde sur le côté, couvre ses oreilles… », complète le Madame Carlier.Les patients de l’HUDERF sont dépistés grâce à cet outil
L’outil est utilisé à l’HUDERF depuis 2018 au sein du Centre Ressources Autisme, mais aussi lors des consultations de pédopsychiatrie générale. Cela permet de repérer plus rapidement les enfants devant bénéficier d’un bilan autisme mais aussi d’éviter les envois non pertinents vers le Centre Ressource Autisme. Les professeurs de la Maternelle Thérapeutique l’ont également intégré dans leur dispositif de pré-admission mais aussi durant la période d’adaptation de deux mois du début de prise en charge pour éventuellement rediriger l’enfant qui présente de l’autisme vers une prise en charge plus spécialisée.« La demande d’outils performants est forte dans le secteur. La précocité est clé pour la prise en charge de l’autisme : au plus tôt un diagnostic est établi, plus il sera facile d’influencer positivement l’évolution de l’enfant avec son trouble. Car en plus d’éviter des problèmes lors du développement de l’enfant, le travail des équipes qui prennent l’enfant en charge après le dépistage permet également d’éviter des problèmes au sein de sa famille, souvent dus au manque de compréhension du problème, ainsi que la difficile stimulation d’un enfant autiste sans outils appropriés », illustre le Pr Véronique Delvenne, chef de service de pédopsychiatrie.[1] L’outil a été validé en 2 étapes, avec une première étude exploratoire et une seconde étude prospective. La phase de validation a notamment rassemblé 126 enfants de 2 ans 1/2 à 6 ans 1/2 en attente d’un bilan diagnostique auprès de 3 centres ressources autisme belges et français. Son développement s’est voulu rigoureusement scientifique, via des cotations à l’aveugle, l’inclusion d’un groupe contrôle, un suivi des cohortes cliniques et le respect des standards internationaux lors du processus diagnostique final. Au terme de cette étude, une valeur de 0.94 a été obtenue pour la spécificité et 0.83 en termes de sensibilité, permettant ainsi de différencier risque de TSA et probabilité d’une autre pathologie (neuro)développementale.
Ressources
http://www.adt-autism.com/
Carlier, S., Ducenne, L., Leys, C., Stanciu, R., Deconinck, N., Wintgens, A., Orêve,M-J., & Delvenne, V. Improving autism screening in French-speaking countries: Validation of the Autism Discriminative Tool, a teacher-rated questionnaire for clinicians’use. Research in Autism Spectrum Disorders, 61, 33-44. Accès via https://doi.org/10.1016/j.rasd.2019.01.010
Carlier, S., Kurzeja, N., Ducenne, L., Pauwen, N., Leys, C., & Delvenne, V. (2017). Differential profile of four groups of children referred to an autism diagnostic service in Belgium: Autism-specific hallmarks. Journal of intellectual Disabilities, 22(4), 340-346. DOI:10.1177/1744629517713516.
Blog – La précocité est clé pour la prise en charge de l’autisme !