Dix idées reçues autour de la vaccination

Nombreuses sont les idées erronées qui circulent sur la vaccination chez l’enfant (et chez l’adulte). Certaines se transmettent même de génération en génération, bien qu’elles aient été démenties ! En cette semaine européenne de la vaccination, il nous semblait important de faire le point sur la vaccination pédiatrique avec les spécialistes de notre hôpital.

Nous mettons le Professeur Pierre Smeesters sur le grill. Chef du service de pédiatrie à l’HUDERF, il est aussi un chercheur de renommée en infectiologie pédiatrique.                                                                                                                               

Idée n°1 : L’amélioration de l’hygiène et de l’assainissement de l’eau feront disparaître les maladies – les vaccins sont inutiles. FAUX

Pr Pierre Smeesters : « Il est faux d’avancer que l’amélioration de l’hygiène permet d’éradiquer un virus ! Si l’hygiène contribue à diminuer ou à retarder la propagation des bactéries pathogènes, elle n’empêche nullement la transmission de maladies infectieuses. Depuis quelques années, la rougeole, maladie devenue rare, est de plus en plus présente en Belgique. Il n’existe pas de traitement, c’est pourquoi il est important de se faire vacciner afin d’éviter une épidémie de rougeole. »

Idée n°2 : Les vaccins ont des effets secondaires nocifs à long terme qui ne sont pas encore connus. La vaccination peut même être mortelle. FAUX

Pr Pierre Smeesters : « La vaccination n’est pas parfaite, mais les vaccins sont très sûrs. Il existe chez certains individus des possibilités de réactions locales (bras douloureux), de légère fièvre, ou plus rarement, de réaction allergiques passagères raison pour laquelle la vaccination doit toujours être encadrée. Rares sont les manifestations post-vaccinales graves et le risque de séquelles dues à la maladie telle que la polio (paralysie) ou la rougeole (encéphalite ou cécité), par exemple, est beaucoup plus grand en cas de non-vaccination.

Les vaccins font l’objet d’une surveillance importante, continue et transparente. L’ensemble des effets secondaires éventuels sont connus et indiqués très clairement dans les différentes notices des vaccins. Certaines réactions rares comme une réaction allergique généralisée (choc anaphylactique) peuvent survenir mais un traitement efficace est disponible chez votre médecin et la proportion entre les risques liés à une réaction rare n’est pas suffisamment importante par rapport aux risques encourus par la non-vaccination. Abandonner totalement la vaccination des enfants et des adultes est extrêmement dangereux, et peut être mortel. »

Idée n°3 : Le vaccin combiné contre la diphtérie, le tétanos et la coqueluche et le vaccin contre la poliomyélite sont responsables du syndrome de mort subite du nourrisson. FAUX

Pr Pierre Smeesters : « Il n’existe pas de lien de cause à effet entre l’administration de ces vaccins et la mort subite du nourrisson. Toutefois, ces vaccins sont administrés à un âge où les bébés peuvent être frappés par le syndrome de mort subite du nourrisson. Si on observe la courbe du nombre de morts subites par an (MSN sur le graphique ci-dessous), on voit très clairement que celle-ci diminue alors que la courbe du taux de vaccination chez l’enfant augmente nettement dans les années 2000 et se stabilise par la suite.

N’oublions pas que ces quatre maladies (diphtérie, tétanos, coqueluche et polio) sont potentiellement mortelles et que les nourrissons qui n’ont pas été protégés contre celles-ci par la vaccination courent un risque de décès ou d’incapacité grave. »

Idée n°4 : Les maladies évitables par la vaccination sont quasiment éradiquées dans mon pays, aussi il n’y a pas de raison de se faire vacciner. FAUX

Pierre Smeesters : « Les maladies telles que la rougeole et la coqueluche sont encore présentes dans nos régions. En 2016, entre janvier et juin, 67 cas de rougeole ont été déclarés dont 55% non vaccinés et 9% partiellement vaccinés. On compte 28 hospitalisations dont 12 enfants de moins de 5 ans et 4 de moins de 9 ans. A l’heure actuelle, plusieurs cas de rougeole ont été récemment recensés chez les enfants en Belgique et à Bruxelles. Le taux de vaccination ayant chuté ces dernières années, moins d’individus sont protégés, ce qui permet au virus de se propager plus rapidement. Concernant la coqueluche, on oublie aujourd’hui que c’est une maladie mortelle. Entre 2010 et 2014, quatre enfants de moins de 5 ans sont morts de la coqueluche alors qu’ici aussi, un vaccin sûr et efficace est disponible.

Idée n°5 : Les maladies infantiles évitables par la vaccination font simplement partie des désagréments de la vie. FAUX

Pierre Smeesters : « On ne peut décemment pas considérer les maladies évitables par la vaccination comme des «désagréments de la vie». Les maladies telles que la rougeole, les oreillons et la rubéole sont des maladies graves qui peuvent entraîner de sérieuses complications à la fois chez les enfants et chez les adultes, parmi lesquelles la pneumonie, l’encéphalite, la cécité, la diarrhée, les infections auriculaires, le syndrome de rubéole congénitale (si une femme est infectée par la rubéole en début de grossesse). Pour certains, c’est la mort. Etre incontinent, sourd, vivre avec une diminution voir une perte totale de la vue… On ne parle plus de désagrément. On parle d’un handicap et d’une qualité de vie affectée. »

Idée n°6 : Donner à un enfant plus d’un vaccin à la fois peut augmenter le risque d’effets secondaires néfastes et surcharger son système immunitaire. FAUX

Pierre Smeesters : « Les données scientifiques montrent que l’administration de plusieurs vaccins en même temps n’a aucun effet néfaste sur le système immunitaire de l’enfant. Les enfants sont exposés chaque jour à plusieurs centaines de substances exogènes qui déclenchent une réponse immunitaire. Regardez les enfants autour de vous, de 0 à 1 an : l’enfant met toute une série de choses en bouche pour découvrir le monde. Lui, ou plutôt son système immunitaire, est colonisé par les bactéries, des milliards de bactéries, ce qui nous indique que le corps est une belle machine capable de recevoir plusieurs vaccins à la fois sans risque d’effets secondaires. De plus, lorsqu’il est possible de bénéficier d’une vaccination combinée, par exemple contre la rougeole, les oreillons et la rubéole, cela signifie moins d’injections et une seule visite chez le pédiatre. »

Idée n°7 : On vaccine plus qu’avant et trop. FAUX

Ce qui a changé foncièrement en 30 ans, c’est la composition des vaccins. Si on prend l’analogie avec un arbre par exemple, imaginez-vous le décomposer en feuilles, écorces et branches. Chacune de ces parties ne compose pas un arbre à elle toute seule. C’est la même chose avec des bactéries que vous pouvez décomposer en protéine, sucre et ADN. Plusieurs vaccins administrés à votre enfant ne contiennent qu’une protéine ou qu’un sucre de la bactérie en question. Il n’y a donc plus d’organisme vivant présent dans ces vaccins-là. Si on compare le schéma vaccinal il y a 40 ans et celui de 2017, la composition des vaccins s’est grandement améliorée et simplifiée et on peut donc dire qu’aujourd’hui : « on protège plus, on vaccine moins ». Les vaccins sont en effet plus purifiés (ne contiennent souvent qu’un composant du vaccin et non une cellule vivante) et permettent de protéger contre plus de maladies.

 

Idée n°8 : Mieux vaut s’immuniser par la maladie que par les vaccins. FAUX

Pierre Smeesters : « Il est vrai d’affirmer que le corps, lorsqu’il développe le système immunitaire, le fait de manière efficace et pour une longue durée. Mais ces processus prennent du temps et ne sont pas toujours sans séquelles dans le cas de maladies graves, lourdes de conséquences. Le vaccin permet d’aider le corps à créer son système immunitaire, mais il ne provoque pas la maladie et ne fait pas courir à la personne immunisée le risque de complications éventuelles liées à la maladie.

Malheureusement, certains enfants dits immunodéficients ne peuvent pas être vaccinés. Leur système immunitaire étant défaillant, ceux-ci ne répondraient pas correctement à certains vaccins. Etre en contact avec des enfants non vaccinés et porteurs de maladies peut dès lors leur être fatal. Il en va donc de la responsabilité sociétale de chacun de se protéger correctement, afin de protéger les autres. »

Idée n°9 : Les vaccins contiennent du mercure et de l’aluminium, qui sont dangereux. FAUX

Pierre Smeesters : « Le thiomersal est un composé organique contenant du mercure qui est ajouté à certains vaccins comme agent conservateur. C’est l’agent conservateur le plus fréquemment utilisé pour les vaccins qui se présentent en flacons multidoses. Il n’existe aucune donnée probante attestant que la quantité de thiomersal utilisée dans les vaccins représente un risque pour la santé.

Pour ce qui est de l’aluminium, celui-ci permet de stériliser et de stabiliser les vaccins. Il est bien entendu aussi présent en quantité extrêmement faible (4mg), plus faible que dans le lait maternel (10mg) ou dans le lait en poudre (40mg).

Les vaccins existent depuis longtemps et sont soumis à de nombreux tests. Si ces derniers avaient été dangereux, ils seraient depuis longtemps supprimés ou remplacés sur le marché. »

Idée n°10 : L’autisme est causé par les vaccins. FAUX

Pierre Smeesters : « Faux encore. Il s’est avéré que l’étude de 1998 qui avait soulevé de nombreuses inquiétudes quant à la possibilité d’un lien de causalité entre le vaccin contre la rougeole-Rubéole-Oreillons (RRO) et l’autisme, comportait de graves irrégularités. Il s’est avéré que le médecin auteur de cet article avait trafiqué ses résultats. La revue qui avait publié cet article l’a ensuite retiré. Le médecin à l’origine de ces faux résultats a été condamné et ne peut plus pratiquer la médecine. Depuis lors, de nombreux travaux, ont démontré l’absence de corrélation entre le vaccin ROR et l’autisme ou les troubles autistiques. Malheureusement, la publication de cet article qui avait semé un vent de panique a conduit à une chute des taux de vaccination et par conséquent à une recrudescence des maladies visées.

 

Le Pr Smeesters vous recommande :

Une infographie amusante venue d’outre-Atlantique : 5 opinion (très) mal informées au sujet des vaccins, par www.lepharmachien.com

Une vidéo avec des témoignages de patients sur Euronews Science : Eliminer la rougeole, une maladie à la gravité oubliée

 

Pour conclure, notez bien que si des études crédibles dans le futur démontrent que certains vaccins représentent un danger potentiel pour la population, les professionnels de la santé modifieront leurs recommandations sans hésitation !