Deux vaccins recommandés chez la femme enceinte

Contrairement aux idées reçues, l’administration de certains vaccins pendant la grossesse a clairement démontré ses avantages. D’abord, une femme enceinte recevant un vaccin sera elle-même protégée de la maladie et de ses complications.  Ensuite, elle fabriquera un grand nombre d’anticorps contre la maladie qui pourront être transférés au fœtus via le placenta et par là protéger celui-ci pendant les 3 à 6 premiers mois de  sa vie.  Ce sont pendant les premiers mois de la vie, justement, que le nouveau-né est le plus vulnérable et que son système immunitaire n’est pas prêt à « répondre » à des vaccins.

Pendant une grossesse, deux vaccins sont recommandés pour protéger la mère et le bébé à naître.

Si la grossesse se déroule pendant la saison grippale, la vaccination contre la grippe est fortement recommandée. Les femmes enceintes font partie des groupes à haut risque de complications de cette maladie ayant pourtant la réputation d’une maladie bénigne.  Pendant le deuxième et le troisième trimestre de la grossesse surtout, les hospitalisations pour grippe chez les femmes enceintes sont 7x plus fréquentes que dans la population du même âge et le risque de décès est réel.  Les complications sont essentiellement d’ordre cardiaque et respiratoire.  Par exemple, chaque année en France, 30 à 60 femmes enceintes sont hospitalisées en réanimation pour grippe grave.  On pense que la grippe est plus grave chez elles car leur réponse immunitaire à l’infection est altérée par les hormones de la grossesse.  Leur capacité pulmonaire peut être aussi diminuée.  La grippe expose également au risque de fausse couche, de mort fœtale (risque multiplié par 2 en cas de grippe) et d’accouchement prématuré.

Pour le nourrisson aussi, surtout avant l’âge de 6 mois, il y a un risque de grippe grave ainsi que d’hospitalisation en réanimation. Malheureusement, le vaccin antigrippal ne peut être administré avant l’âge de 6 mois : il sera très peu efficace car le système immunitaire à cet âge est immature.

Le vaccin antigrippal administré pendant la grossesse a démontré son efficacité dans de nombreuses études, tant sur les hospitalisations des femmes enceintes que sur les grippes prouvées et sur les complications liées à la grippe. On a pu également démontrer que les nouveau-nés de femmes vaccinées pendant la grossesse étaient protégés contre la grippe pendant plusieurs mois, les fameux premiers mois pendant lesquels ils sont le plus vulnérables.

Enfin, le vaccin antigrippal a été étudié chez des centaines de milliers de femmes enceintes et n’a montré aucun effet secondaire délétère chez la femme, le fœtus, le nouveau-né ou encore le déroulement de la grossesse. Il peut donc être utilisé sans risque à tout moment de la grossesse.

La ligne rouge montre que les cas de grippe (Influenza) prouvée sont moins fréquents chez les mamans vaccinées (à gauche) et chez les bébés nés de maman vaccinée (à droite) jusqu’à au moins l’âge de 6 mois.

La réapparition de la coqueluche

Depuis 2011, on observe une résurgence de cette maladie très contagieuse dans nos pays ainsi que dans différentes régions du monde, même dans celles qui ont une couverture vaccinale élevée. Pour lutter contre cette résurgence, la vaccination des femmes enceintes entre 24 et 32 semaines de grossesse, à répéter à chaque nouvelle grossesse, permet de donner au bébé à naître les anticorps de sa mère via le placenta. Elle est recommandée par le Conseil Supérieur de la Santé.

Un rappel de vaccination chez les adultes en contact avec des enfants en bas âge (<1 an), appelé  la vaccination cocoon est également recommandé chez nous depuis 2009.

De nombreux pays de l’Union Européenne ont enregistré́ un nombre croissant de cas, principalement chez les très jeunes nourrissons, les adolescents et les adultes.

Cas de coqueluche 2011-2014

De nouveau, ce sont les tous petits bébés, les nourrissons de moins de 6 mois qui vont être les plus vulnérables vis-à-vis de la coqueluche car ils sont susceptibles de développer une complication potentiellement fatale, les apnées. Ces nourrissons sont généralement contaminés au départ d’adolescents et d’adultes, souvent au sein de la cellule familiale.

Vacciner la femme enceinte à chaque grossesse permet à la maman vaccinée de « booster » son taux d’anticorps anti-coqueluche : on augmente alors la quantité d’anticorps transférée au fœtus et on améliore la protection passive du nouveau-né.  A sa naissance, celui-ci va garder des taux d’anticorps protecteurs plusieurs mois.

Les études montrent que la vaccination pendant la grossesse évite 91-93% des cas de coqueluche du nouveau-né. Elles ont montré également l’innocuité du vaccin contre la coqueluche pendant la grossesse. Une induration au site d’injection est l’effet indésirable le plus souvent décrit, suivi par un gonflement léger à ce même site.  Ces légers désagréments sont résolus dans les 72 heures suivant la vaccination.

Dans toutes les études disponibles, il n’y a aucun effet indésirable de cette vaccination chez la femme enceinte, le fœtus, le nouveau-né ou encore le déroulement de la grossesse.

En conclusion, la vaccination antigrippale et anti-coqueluche pendant la grossesse ont clairement montré des bénéfices importants pour la mère et l’enfant à naître, et le recul d’utilisation est suffisant pour pouvoir assurer leur innocuité. Comme soignant, il est de notre rôle de recommander ces vaccins aux femmes enceintes.  En tant que future maman, vous pouvez donc être rassurée : vous effectuez le bon geste pour vous protéger et protéger votre bébé.

 

Dr Charlotte Martin

Chef de Clinique Adjoint en Maladies Infectieuses

Responsable de la Travel & Vaccine Clinic

CHU Saint-Pierre

Références

  • Omer Maternal Immunization N Engl J Med 2017;376:1256-67.
  • Madhi et al. Influenza Vaccination of Pregnant Women and Protection of Their Infants N Engl J Med 2014;371:918-31.
  • Kourtis et al.   N Engl J Med. 2014 ; 370(23): 2211–2218
  • Zaman et al. New Eng J Med 2008 ; 359(15):1555-64
  • Vaccination anticoquelucheuse (avril 2014) (Conseil Supérieur de la Santé n° 9110)

Avis aux professionnels : un séminaire-webinar est prévu le vendredi 27 avril à 17h. Rendez-vous à l’HUDERF, au CHU St Pierre ou en ligne, lors de la Semaine de la Vaccination.

 


 

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